À propos

elle

Nicole Pessin a fait de l’aquarelle ses cieux, de l’encre sa terre. Ici, des personnages ailés se font parfois marcheurs, dans l’aube d’or de ses créations aux accents symbolistes. L’art de Nicole Pessin nous enveloppe de dorures, couleurs, tissus et, c’est nimbés de ce violine incandescent qui lui est si cher que nous nous transformons, chrysalide nouvelle hors de la sombre gravité qui nous oppressait alors.
Evoluant d’arbres d’automne en carrelages damés, d’herbes folles en tapisseries du vieux temps, nous naissons à un monde affranchi des lois de la pesanteur et rythmé par le lent déploiement de fleurs kaléidoscopiques.

Il en est des détails de la composition comme de la cartographie d’un coeur, où flux et reflux des courbes de papiers et de perles épousent l’intime secret du sentiment.

Verre de vin, canne et chapeau melon nous parlent de dandys aux poses nostalgiques qui côtoient d’un sourire l’envol fantastique de larges plaines d’automne au bruissement d’oiseaux. Nicole Pessin, l’artiste aux tableaux de lumière énigmatique. Son recueil intérieur : c’est un bestiaire des silences marins, c’est un herbier de floraisons mutiques, c’est une nuit éclose et triste que réveille soudain le train vert et tardif. Synesthésie parfaite, ses œuvres se parent de poésies parfois urbaines souvent miraculeuses, dans un monde où le possible reste le désiré. Et rien ne dit mieux cette harmonie de la couleur du mot que ses enluminures d’alphabets, véritables vestiges d’un art presque oublié.

Lettres et instants se mêlent : infiniment proches, infiniment lointains, car l’ailleurs n’a jamais été aussi intime que sur ces pages que Nicole Pessin habite de sa douce mélancolie. Ici il n’est que l’image : seul début, seule fin, seule vie. L’oeuvre de cette artiste est toute d’un voile de surimpression pudique et patiné : les yeux se closent, les silhouettes s’en retournent, seuls les anges proposent leurs visages mutins à la contemplation. « La Nature est un temple où de vivants piliers /Laissent parfois sortir de confuses paroles ». Son oeuvre rayonne de cet art des Correspondances qui furent si chères à Baudelaire en ce dix neuvième siècle industriel.
Et les temps n’ont pas changé ; qui sombrent encore irrémédiablement dans le moderne gris de l’acier diabolique.

Nicole Pessin anime d’une flamme toute personnelle les habitants endormis de cités oubliées. Ses gestes minutieux témoignent de l’attention aimante qu’elle insuffle à son monde, lent, rare et beau. Il nécessite pour nous le cristallin d’une âme enfantine et se laisse apprécier au son d’un piano de Rêverie nocturne, pour une déambulation funambule. Munis d’un balancier de voile blanche, nous parcourrons ces oeuvres comme on parcourt un songe.

Mélanie Chambefort

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